Conference abstract

Histoire de l’éradication du paludisme en Tunisie

Pan African Medical Journal - Conference Proceedings. 2017:4(1).08 Nov 2017.
doi: 10.11604/pamj-cp.2017.4.1.379
Archived on: 08 Nov 2017
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Keywords: Paludisme, malaria, histoire, Tunisie, éradication
Abstract

Histoire de l’éradication du paludisme en Tunisie

Salem Bouomrani1,&

1Service de Médecine Interne, Hôpital Militaire de Gabès, Tunisie

&Auteur correspondant
Salem Bouomrani, Service de Médecine Interne, Hôpital Militaire de Gabès, Tunisie

Abstract

Introduction: le paludisme ou malaria est une érythrocytopathie potentiellement mortelle due à un hématozoaire, parasite unicellulaire du genre plasmodium, transmis par des moustiques du genre anophèles. Il représente l’une des maladies vectorielles les plus fréquentes dans le monde occasionnant, selon les dernières publications officielles de l’OMS (Aide-mémoire N°387 publiée en Février 2016) plus de 400.000 décès par an, la plupart survenant chez des enfants de moins de cinq ans. Cette parasitose est particulièrement fréquente et grave en Afrique sub-saharienne (88% des cas de paludisme et 90% des décès en 2015 selon le rapport de l’OMS); mais sévit encore dans 95 pays et territoires en Asie, Amérique latine et Moyen-Orient (Aide-mémoire N°94 publiée en Avril 2016) représentant un véritable fléau et problème de santé publique mondiale du fait qu’environ 3,2 milliards de personnes (la moitié de la population mondiale) sont exposés au risque de la contracter et que 214 millions de cas de paludisme ont été diagnostiqués en 2015 dont 438.000 étaient mortels. Ces constatations incitaient l’OMS, depuis des décennies d’ailleurs, à mettre en marche plusieurs actions curatives et préventives et instaurer un programme mondial ambitieux de lutte antipaludique dont les objectifs actuels sont: réduire de 90% l’incidence du paludisme au plan mondial d’ici 2030, réduire de 90% les taux de mortalité palustre au plan mondial d’ici 2030, éliminer le paludisme dans au moins 35 pays d’ici 2030, empêcher la réapparition du paludisme dans tous les pays exempts. Les actions n’étaient que partiellement fructueuses amenant, entre 2000 et 2015, à une baisse de 37% de l’incidence de cette parasitose, une baisse de 60% de son taux de mortalité et une baisse de 65% de sa mortalité infantile de moins de cinq ans (Données de l’OMS 2016).

Méthodes: revue systémiques de la littérature mondiale et de l’histoire médicale tunisienne concernant le paludisme.

Résultats: le paludisme sévissait en Tunisie depuis la nuit des temps, les premières traces documentées de la fièvre palustre se reconnaissaient dans les ouvrages des médecins de « l’école de médecine de Kairouan » des IXe et Xe siècles comme Ibn Aljazzar et Ibn Soleimen (Pr Bouzouaia N. 2013). Les actions de lutte contre cette parasitose commençaient réellement en 1903 avec la création par Charles Nicolle d’un département antipaludique à l’Institut Pasteur de Tunis. Ces actions, simples au début (chimioprophylaxie par la quinine chez certains groupes de la population exposée et application de larvicides dans les grandes villes) se sont canalisées et solidifiées à partir de 1931 avec la grande épidémie palustre de 1931-1932 où plus de 20% de la population était infesté! On enregistrait en moyenne 8700 cas de malaria/an [4237-15912] dans les années 1934 à 1938 (Chadli A. Pathol Exot. 1987). Ces constatations incitaient à la mise en place d’un service spécialisé de lutte antipaludique mené par des infirmiers dit « agents mobiles quinisateurs » qui effectuaient des visites régulières dans les différentes localités du pays, traitant les cas confirmés ou suspects, réalisant les lames sanguines et repérant les gites larvaires des moustiques. Ces mesures étaient efficaces mais la situation se dégradait rapidement après la seconde guerre mondiale où les statistiques notaient une incidence moyenne de l’ordre de 12.200 cas de paludisme/an [4711-16166] dans les années 1944 à 1949 (Archive de l’OMS-Avril 1956). C’est ainsi que, très rapidement après l’indépendance (1957), le gouvernement tunisien ayant conscience de l’ampleur de cette maladie décida de lancer un programme national visant son élimination. Après une période dite d’enquête de « pré-éradication » (1957-1967), ce programme débutait effectivement en 1968 sous l’appellation du « Programme Nationale d’Eradication du Paludisme, PNEP » en collaboration étroite avec l’OMS. Initialement appliqué dans une zone pilote de la république tunisienne englobant les gouvernorats de Sousse et de Kairouan, ce programme se généralisait par la suite pour couvrir l’ensemble du pays en 1972. Ce PNEP était organisé en quatre phases principales: phase préparatoire, phase d’attaque, phase de consolidation et phase d’entretien et consistait au recrutement et formation du personnel spécialisé, dépistage et traitement efficace des sujets malades, repérage des gites larvaires et pulvérisation d’insecticides à effet rémanent.

Conclusion: l’ensemble de ces actions étaient couronné par l’éradication de la maladie dans notre pays en 1979 (Fische A. 1988); année où les trois derniers cas autochtones de paludisme furent enregistrés. Depuis cette date, seulement une trentaine de cas en moyenne par an de paludisme dit « d’importation » sont diagnostiqués et traités en Tunisie (Belhadj S. 2008, Aoun K. 2010).